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Boire local, penser global : ces spiritueux qui méritent notre attention

Le 16 avril dernier, une étape importante a été franchie dans le monde des spiritueux québécois : l’Acerum du Québec est devenu officiellement le premier spiritueux à obtenir une Indication Géographique Protégée (IGP) dans l’histoire du Canada. Cette reconnaissance souligne non seulement la qualité unique de cet alcool distillé à partir de sève d’érable fermentée, mais elle vient aussi affirmer l’importance de protéger les terroirs et les savoir-faire locaux dans un marché mondial souvent standardisé.

Dans l’univers des spiritueux, certains noms reviennent en boucle — whisky, gin, rhum, vodka. Des valeurs sûres, certes. Mais à trop répéter les mêmes classiques, on en vient à oublier une richesse infinie d’alcools profondément liés à des cultures, des climats et des traditions que l’on connaît trop peu. Derrière chaque région, chaque culture, se cache un alcool profondément enraciné dans son territoire, souvent méconnu, parfois menacé.

Aujourd’hui, alors que les amateurs cherchent à consommer avec plus de conscience et de curiosité, plusieurs spiritueux méconnus refont surface. Et à travers eux, ce sont des voix, des savoir-faire, et des territoires entiers qui peuvent enfin se faire entendre.

Des alcools enracinés dans leur culture

Sotol — Nord du Mexique

Souvent confondu avec le mezcal, le sotol est distillé à partir du Dasylirion, une plante du désert. Il se distingue par ses notes herbacées, presque minérales. Loin des grandes productions de tequila, il reflète l’aridité et la résilience de son terroir d’origine — les États de Chihuahua, Coahuila et Durango.

Lao Khao — Thaïlande

Spiritueux de riz blanc distillé artisanalement dans les campagnes thaïlandaises, le lao khao est omniprésent dans les rituels quotidiens, des fêtes de village aux offrandes religieuses. Souvent considéré comme un produit rural et peu noble, il représente pourtant une forme d’identité locale forte, façonnée par les traditions agricoles du pays.

Singani — Bolivie

Distillé exclusivement à partir de muscat d’Alexandrie cultivé en haute altitude (au-dessus de 1600 mètres), le singani est protégé par une appellation d’origine (Denominación de Origen). Il est au cœur de la culture bolivienne et fait aujourd’hui l’objet d’une campagne pour sa reconnaissance comme IG à l’international. Léger, floral, d’une grande pureté aromatique, il représente un pan important de l’identité andine.

Shochu – Japon (GI Shochu Amami, Iki, etc.)

Bien que souvent confondu avec le saké, le shochu est un spiritueux distillé à base de patate douce, riz, orge ou sarrasin. Certaines régions bénéficient d’indications géographiques (comme Amami ou Iki), reconnues par le gouvernement japonais. Chaque terroir donne un style très différent, et les méthodes de fermentation ancestrales sont préservées avec fierté.

Acerum  — Québec

Distillé à partir de sève d’érable 100 % québécoise, l’Acerum offre une expression audacieuse et singulière de la ressource la plus emblématique du terroir québécois. Premier spiritueux canadien à bénéficier d’une indication géographique protégée (IGP), il conjugue tradition acéricole et esprit d’innovation. Sa fabrication, exclusivement à base de sirop d’érable et encadrée par un cahier des charges rigoureux, exclut tout ajout après distillation – à l’exception de l’eau – pour préserver l’intégrité et la pureté du produit.

Les IGP : protéger plus qu’un produit

Une indication géographique protégée (IGP) ne sert pas qu’à mettre un logo sur une étiquette. Elle protège un territoire, une culture, et une manière de faire. Elle garantit que ce que vous avez dans votre verre est authentique, enraciné et non reproductible ailleurs.

L’obtention d’une IGP, comme pour l’Acerum au Québec, est un processus rigoureux. Il faut prouver que le produit :

  • Est fabriqué dans une zone géographique bien définie,

  • Utilise des méthodes de production précises et souvent traditionnelles,

  • Possède des caractéristiques qui le distinguent clairement d’autres produits.

Pour les producteurs, cette démarche implique un engagement fort à respecter un cahier des charges strict, qui définit les matières premières, la méthode de distillation, le vieillissement et même les conditions de mise en marché.

En retour, l’appellation apporte :

  • Une protection légale contre les imitations,

  • Une valorisation commerciale et culturelle,

  • Une reconnaissance officielle qui rassure et fidélise le consommateur.

Dans un marché globalisé où les grandes marques dominent, les IG sont donc essentielles pour préserver la diversité, soutenir les artisans locaux et encourager une consommation plus responsable.

Repenser notre façon de consommer

Acheter local, ou découvrir un nouvel alcool, c’est bien plus qu’un simple plaisir gustatif :

  • C’est encourager une économie circulaire, à taille humaine ;

  • C’est protéger des traditions culturelles parfois en voie de disparition ;

  • C’est diversifier son palais avec des profils uniques et non standardisés ;

  • Et c’est, bien souvent, faire un geste plus responsable pour l’environnement.

Chaque spiritueux traditionnel raconte une histoire. Celle d’un climat, d’une plante, d’une communauté, d’une façon de vivre. Chez Fove, on croit profondément que les produits qui ont un ancrage local fort sont ceux qui méritent de voyager — pas l’inverse.

C’est ce qui nous motive à distiller de l’Acerum, ici, au Québec. Pas pour copier ce qui existe ailleurs, mais pour créer quelque chose de vrai, de distinct, de durable.

Parce qu’un spiritueux véritablement local est un pont entre les traditions d’hier et les découvertes de demain.

Et vous, quel spiritueux issu d’un terroir méconnu aimeriez-vous voir mieux représenté derrière nos bars?